Contenance et limites qui font grandir : quels oui ? quels non et comment ? Par Monique Busquet

Psychomotricienne, formatrice petite enfance

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La question de l’autorité suscite des débats particulièrement passionnés : comment amener les enfants à respecter chacun, l’autre et lui-même ? Voici, de façon synthétique, quelques-unes de mes boussoles sur ces questions d’autorité.

Le jeune enfant a un besoin impérieux à la fois de contenance et de limites, pour qu’il puisse développer comme « une peau »,  une « enveloppe corporelle et psychique », une « cape protectrice », qui puisse contenir les excitations venues de l’extérieur et celles venues de son « intérieur ».  Les limites sont celles de son corps, de son espace, de son territoire et progressivement de ses actions et comportements.
Cette contenance est apportée par l’adulte, dans le « prendre soin », par le portage, le toucher, la proximité,  par l’attention à ce que vit l’enfant et par les limites qui lui sont données. Elle passe par des oui pour répondre au maximum aux besoins de l’enfant et par des non pour respecter les besoins des autres (et les siens).   Ces oui et ces non sont souvent difficiles à ajuster, autant comme parent que comme professionnel.

Des Non clairs et cohérents. Les interdits fondamentaux sont là pour protéger les autres et donc chacun, enfants comme adultes.
Il est interdit de faire mal, ( taper, mordre, pousser…), de déranger et gêner l’autre, d’empiéter sur son corps, sur son espace, « son territoire (prendre le jeu dans la main d’une autre).
Le jeune enfant a besoin d’être entouré d’adultes suffisamment solides, pour lui faire respecter ces limites et ainsi le protéger lui et les autres : « je ne te laisse pas faire mal à l’autre, ni à moi, ni à toi-même ».  Le rôle des adultes est de faire respecter ces interdits fondamentaux, ces limites en fonction des « territoires et besoins » des autres. Dire et « faire » respecter des vrais non à ce que fait l’enfant, de façon claire et solide. Il s’agit en même temps d’accompagner l’enfant à supporter ces limites, les frustrations, les attentes, les impossibles. Pour cela, il est nécessaire de savoir faire la différence entre ce que fait l’enfant et ce qu’il est, ce qu’il ressent, ce qu’il vit.

Des Oui aux ressentis de l’enfant. C’est accueillir les émotions qui traversent l’enfant, les accepter, les reconnaître comme « légitimes ».  C’est savoir que l’impulsivité du tout-petit est involontaire et non encore contrôlable. C’est se rappeler que ses réactions sont le plus souvent des explosions et non des provocations. C’est savoir qu’il lui est difficile de respecter les limites, même lorsqu’il les a compris. C’est aussi savoir que l’enfant pourra d’autant plus respecter les limites, et progressivement « se contenir », que ses émotions peuvent s’exprimer et que l’ensemble de ses besoins sont suffisamment satisfaits.

Des Oui aux besoins de l’enfant. L’adulte est aussi là pour répondre aux besoins de l’enfant et essayer de les satisfaire. Respecter ses rythmes physiologiques, ses besoins de sécurité affective, de suffisamment de temps de relation de qualité, ses besoins de sommeil, de bouger, d’explorer, d’agir et d’expérimenter ses propres capacités, de voir les résultats de ses actions, de faire par lui-même…

Savoir à quoi dire oui, à quoi dire non, me paraît un socle essentiel pour une autorité juste, solide, rassurante, qui aide à grandir dans ce respect de soi et des autres et à savoir ajuster progressivement ses oui et ses non, dans une prévention à court et long terme de résistance à tout type de violences et abus.
Accompagner ainsi l’enfant est loin de laisser l’enfant faire ce qu’il veut, ou lui dire oui à tout.

Et nous ?  Accompagner l’enfant à respecter les autres et donc les interdits passe aussi par une attention à nos propres façons de faire. L’enfant apprend essentiellement par imprégnation, par imitation en différé. Ses réactions, ses comportements prennent ses racines sur ce qu’il nous voit faire, plus que sur ce qu’il lui est demandé de faire. Que donnons-nous à voir de nos réactions, autant avec les enfants qu’entre adultes dans les moments de désaccords et de tensions : parler, sans attaquer, sans s’écraser.  « Ni paillasson, ni hérisson »!

Que gardons-nous, souvent malgré nous, individuellement et collectivement des traces des autoritarismes, des soumissions, des confusions entre la culpabilité et la responsabilité ? Et qu’en transmettons-nous ?

 
Article rédigé par : Monique Busquet
Publié le 17 mai 2023
Mis à jour le 17 mai 2023