Empathie : de quoi s’agit-il ? Par Monique Busquet
Psychomotricienne
L’empathie consiste « à se mettre à la place de l’autre sans forcément éprouver ses émotions », écrit Alain Berthoz (1). Jean Decety (1) précise « C’est la capacité à se mettre à la place de l’autre pour comprendre ses sentiments et ses émotions ». L’empathie comporte donc l’intention de percevoir ce que l’autre éprouve, ressent et pense, elle n’est pas spontanée.
Ce n’est pas simplement le fait de ressentir les émotions de l’autre : il s’agit alors de contagion émotionnelle. Dans la contagion des émotions, nous devenons tristes quand nous voyons quelqu’un de triste. Nous nous énervons quand nous sommes en présence de quelqu’un qui est énervé. Parfois nos larmes montent quand nous voyons quelqu’un pleurer. Cette contagion repose sur les neurones miroirs de notre cerveau, neurones qui s’activent en miroir de ce que nous voyons et qui nous font en particulier ressentir ce que l’autre ressent.
L’empathie n’est pas non plus de la sympathie. Dans la sympathie, nous avons des affinités, des ressemblances, des complicités. Nous percevons les choses sensiblement de la même façon. Nous nous identifions à la personne que nous trouvons sympathique. Un lien d’affection nous lie à cette personne. Souvent alors nous cherchons à secourir la personne pour laquelle nous avons de la sympathie, nous cherchons à lui rendre service.
L’empathie est une posture, un état d’esprit réfléchi et volontaire. Il s’agit de décider de s’ouvrir à l’autre, de s'ouvrir à sa différence. C’est la capacité à percevoir le point de vue de l’autre. L’autre a un point de vue différent. Il vit une situation depuis sa place, il voit les choses selon son angle de vue, sa perspective, son vécu, selon sa personnalité, son histoire, ses valeurs.
Ainsi deux personnes peuvent avoir raison, même si leurs points de vue sont diamétralement opposés. ll nous faut nous décentrer pour nous mettre à la place de l’autre comme un autre. Il nous faut sortir de nos cadres de pensée, de nos propres ressentis. Cela nécessite de faire un effort : accepter de percevoir quelque chose de différent, parfois éloigné de nous.
On distingue dans l’empathie une partie émotionnelle, qui permet de percevoir les émotions de l’autre, et une partie cognitive, qui permet de percevoir ce que l’autre pense. Cette dernière capacité est à mettre en lien avec la théorie de l’esprit (peut-être un prochain sujet !).
Ainsi l’empathie est un élément essentiel de la posture professionnelle, c’est un état d’esprit qui se travaille, qui s’exerce.
Avoir de l’empathie, c’est réellement s’ouvrir à l’autre. C’est accepter qu’il agisse et réagisse différemment que nous, qu’il fasse autrement que ce que nous ferions dans la même situation.
C’est pouvoir reconnaitre, accepter d’autres choix. C’est reconnaître par exemple que des parents, ou des collègues, aient un autre point de vue sur un évènement, une autre façon de percevoir que la nôtre. En quelque sorte, c’est les comprendre même si nous ne les comprenons pas ! C’est pouvoir percevoir que chacun réagit différemment, dans ses émotions et dans ses façons de voir, de réagir, de penser. C’est reconnaître que chacun est légitime dans sa différence.
Cela permet à chacun d’être plus souple, plus tolérant.
Développer cet état d’esprit nécessite de nous y exercer, de dépasser nos réactions immédiates, spontanées, intuitives. Cela facilite alors grandement la communication entre adultes, parents et collègues, cela permet de créer de réelles relations de confiance. Cela ouvre à une plus grande sérénité et qualité de relations. Tout le monde en sort gagnant.
(1) « L’empathie », ouvrage collectif sous la direction d'Alain Berthoz, Editions Odile Jacob
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