Renouer avec l’enthousiasme en petite enfance. Par Sandrine Moreira, psychologue clinicienne

Où sont passés la passion, l’engouement des adultes intervenant dans la petite enfance ? Pouvons-nous continuer de penser, de réfléchir au mieux pour les jeunes enfants si notre enthousiasme s’est terni avec le temps ? Les réponses de Sandrine Moreira, psychologue clinicienne et formatrice petite enfance.
Au quotidien, un antidote à la lassitude
Le principal ingrédient de notre professionnalisme n’est-il pas cet enthousiasme* mis au profit des jeunes enfants et de leurs familles ? Celui-ci nous porte et nous emmène dans des contrées encore inconnues de réflexions, de projets, de perspectives et d’initiatives. C’est par ce biais que les équipes osent proposer autrement, autre chose aux jeunes enfants. C’est aussi grâce à cela, que le regard posé sur l’enfant reste bienveillant et chargé de bonnes intentions.
L’enthousiasme est l’antidote à la lassitude, à l’ennui professionnel. Cet ennui qui détruit la magie et l’entrain au quotidien. Cette “vitamine professionnelle”, ce carburant est indispensable à la synergie d’une équipe et au bien-être des enfants. Les adultes ayant perdu cette énergie voient leur patience s’effriter, leur bienveillance s’éteindre, leur disponibilité rétrécir, leur pas s’alourdir, leur affection pour l’enfant se raidir…
 
Les enfants sont pleins d’enthousiasme, cette énergie puissante qui les pousse à découvrir, apprendre, explorer, qui les rend experts des insectes ou en encore des planètes...
L’enthousiasme rend l’effort heureux, consenti et non subi... Gardons notre âme d’enfant, prenons exemple.
 
La réalité institutionnelle : ces métiers sont peu reconnus et valorisés, malheureusement !
Proposons des campagnes invitant les professionnelles à retrouver leur magie d’autrefois, leur enthousiasme perdu dans les méandres des difficultés institutionnelles, dans les plannings changeant par les absences des collègues. Parce que c’est ça aussi la réalité des métiers de la petite enfance, une adaptabilité de tous les instants et un essorage à 1000 tours/min parfois.
“Les difficultés de terrain” dans notre jargon, empoisonnent le quotidien, affectant la prise en charge des enfants tout en épuisant les professionnelles.
 
Pour beaucoup, la perte de leur enthousiasme est due aux déceptions répétées et au sentiment que le monde qui nous entoure nous échappe et ne correspond plus à nos valeurs profondes.  Le “c’était mieux avant” prend racine et pousse à grande vitesse dans de nombreux esprits grignotant l’espace de l’enthousiasme.
 
Souvent il est pensé et proposé des séances de cohésions d’équipe, les fameux team building pour fédérer autour d’un karaoké ou d’un escape game... et c’est super efficace !
 
Mais pensons aussi à cette “thérapie de l’enthousiasme” : renouer avec l’enfant, ses besoins, qui il est, ce que nous pouvons lui offrir, l’émerveillement ressenti face à leurs rires, leur premier mot, leurs premiers quatre pattes, aux moments de joie éprouver avec eux, aux jeux partagés, aux gestes d’affections donnés et qui apaisent l’enfant en détresse...
 
Comme nous gardons notre regard émerveillé d’enfant devant un tour de magie, gardons-le face à la petite enfance et tous les trésors qu’elle renferme.
 
Alors pensons à entretenir l’enthousiasme et l’émerveillement dans nos métiers !
 

 
* Définition de l’enthousiasme : Emotion puissante qui s’empare de quelqu‘un à propos de quelqu’un ou de quelque chose et qui se manifeste par des signes d’admiration, de contentement, d’exaltation.  Synonyme : Engouement. (Larousse)
Article rédigé par : Sandrine Moreira, psychologue clinicienne et formatrice petite enfance
Publié le 10 juin 2024
Mis à jour le 11 juin 2024