Service public de la petite enfance : les principales mesures du gouvernement
Ce n’était pas des paroles en l’air. Le gouvernement compte bien créer suffisamment de places pour « garantir l’accueil de chaque jeune enfant » et s’engage ainsi à 100 000 places supplémentaires d’ici 2027 et 200 000 à horizon 2030. Pour y parvenir, plusieurs actions vont être entreprises. L’une concerne la clarification de la gouvernance, et c’est l’article 10 de la loi sur le plein emploi qui en détaille le contenu (cf Lettre Hebdo 94-95). En pratique, les communes auront le rôle d’autorités organisatrices de l’offre d’accueil, compétence qu’elles pourront transférer aux intercommunalités. Elles seront soutenues financièrement et en ingénierie par branche famille de la sécurité sociale. Par ailleurs, ce même article prévoit que « la politique d’accueil du jeune enfant est conduite dans le cadre d’une stratégie nationale adoptée par arrêté du ministre de la famille et qui détermine notamment les priorités et objectifs nationaux pluriannuels en matière de développement quantitatif et qualitatif de l’offre d’accueil et de formation des professionnels de la petite enfance ». En outre, les Comités départementaux de services aux familles (CDSF) seront en charge du suivi du schéma pluriannuel de maintien et développement de l’offre d’accueil des communes afin que la politique d’accueil du jeune enfant mise en place sur le territoire réponde aux besoins des familles. A noter : « si les résultats ne sont pas atteints dans un territoire, alors les CAF peuvent intervenir en dernier ressort afin de garantir l'ouverture de nouvelles places », peut-on lire dans le dossier de presse « Service public de la petite enfance : garantir un meilleur accueil du jeune enfant », synthétisant les mesures.
Et comme l’argent est le nerf de la guerre, un financement conséquent a été annoncé : 5,5 milliards d’euros supplémentaires d’ici la fin du quinquennat. Il a également été rappelé l’harmonisation des restes à charge des familles entre les modes d’accueil (crèche/assistante maternelle), qui sera effectif en 2025.
Etre au plus près de toutes les familles : RPE, places Avip, accueils souples…
Dans l’idée d’ « Aller vers chaque famille pour les accompagner vers un accueil réellement universel », le gouvernement souhaite que chaque commune de plus de 10 000 habitants se dote d’un RPE. A noter : dans l’article 10 de la loi sur le plein emploi, il est écrit que les missions des RPE seront étendues. Ils pourront ainsi être charge du contrat qui lie les parents-employeurs et les assistantes maternelles. (cf Lettre Hebdo n°94-95) Une mesure qui a provoqué une levée de boucliers.
L’accent sera également mis sur le développement des crèches Avip, « avec l’objectif d’atteindre 1 000 accueils labellisés « A vocation d’insertion professionnelle » (AVIP) supplémentaires », est-il précisé.
Enfin, soucieux de lutter contre les inégalités de destin, et en particulier d’enrayer le non-recours aux modes d’accueil formel de certaines familles, le gouvernement soutiendra « les initiatives locales qui pratiquent l’aller-vers et la sensibilisation à la socialisation des enfants » via le Pacte des solidarités et le « Fonds d’innovation pour la petite enfance. Et, dans le sens du dernier rapport du Conseil de l’enfance et de l’adolescence du HCFEA, « Qualité, flexibilité, égalité : un Service public de la petite enfance favorable au développement de tous les enfants avant 3 ans », le gouvernement souhaite développer les accueils souples et flexibles pour offrir à tous les enfants une expérience de socialisation avant l’entrée à l’école maternelle.
4 axes pour améliorer la qualité d’accueil
1/La formation des professionnels de la petite enfance : elle va faire l’objet d’une attention toute particulière. En pratique, avec le Comité de filière petite enfance sera élaboré un socle de compétences commun. Pour rappel, cette mesure faisait partie des 39 recommandations de l’IGAS et était déjà préconisée dans le rapport Giampino de 2016. Autre action prévue : un programme national de recherche Petite Enfance sera mis en place afin « d’enrichir les formations dispensées sur le développement du jeune enfant ». Le nombre d’heures dévolu à l’analyse de la pratique sera accrû, le financement également. Même chose pour l’organisation de journées pédagogiques qui deviendra obligatoire.
2/Le financement et le nombre de pros en micro-crèche : décrié, le système actuel de la PSU sera revu. Concrètement : il y aura une augmentation de la part du financement à la place par rapport au financement à l’heure. « En complément du « Fonds d’innovation pour la petite enfance » doté de 10 millions d’euros, destiné à financer les territoires accélérateurs de la nouvelle politique d’accueil du jeune enfant, un fonds dédié à l’amélioration de la qualité d’accueil doté de 70 millions d’euros ouvrira la possibilité de financements complémentaires aux structures les plus engagées », est-il aussi précisé. Et, « une mission sera lancée sur le modèle de financement des micro-crèches financées par la prestation d’accueil du jeune enfant afin de garantir une meilleure qualité de l’accueil ». Enfin, terminé le système dérogatoire dont bénéficiaient les micro-crèches concernant le taux d’encadrement. Deux professionnels devront être présents dès le premier enfant.
3/L’augmentation des contrôles : ils seront donc plus réguliers, concerneront tous les modes d’accueil et les groupes de crèche en feront eux aussi l’objet. « Une fréquence minimale de contrôle sera instaurée pour les crèches en limitant dans le temps leur durée d’autorisation », est-il indiqué. Par ailleurs, « des plans de contrôle ciblés et coordonnés entre le conseil départemental, la caisse d’allocations familiales et l’État seront établis » et « un système d’information national sera mis en place pour assurer la remontée et le suivi des signalements d’incidents en termes de qualité d’accueil. » C’est la présidente du conseil départemental du Maine-et-Loire, Florence Dabin, qui assurera le suivi de l’ensemble de ces actions.
4/Pallier la pénurie de pros et améliorer l’attractivité : en élaborant un observatoire des métiers et de la qualité de vie au travail dans le secteur de la petite enfance et en renouvelant la campagne de valorisation des métiers de la petite enfance. De plus, « l’offre de formation sera accrue, objectif partagé entre l’État, les Régions, en charge de cette compétence, les départements et les branches professionnelles, dans le cadre d’une trajectoire définie en lien avec l’ensemble des acteurs concernés. À ce titre, et en complément de l’augmentation des places de formation initiale décidée dans ce cadre, l’État intègrera pleinement les métiers de la petite enfance dans l’ensemble des actions qu’il conduit s’agissant des métiers en tension, concernant notamment le développement de programmes de reconversion professionnelle. » Enfin, concernant les revalorisations salariales, il est précisé que les partenaires sociaux travaillent actuellement sur le sujet et que « les propositions sont attendues prochainement ».
Loi plein emploi, Cog et plan d’urgence pour la qualité d’accueil
Si, concernant la gouvernance, les mesures sont prévues par la future loi sur le plein emploi, que la négociation de la Cog 2023-2027 est en cours, « la déclinaison opérationnelle » des autres axes (le plan d’urgence pour la qualité d’accueil) fera l’objet d’une concertation ce mois-ci. Jean-Christophe Combe « précisera notamment l’organisation des travaux :
*D’évaluation du référentiel national relatif aux locaux et à l’aménagement des crèches.
*D’établissement de référentiels nationaux relatifs aux pratiques professionnelles et organisationnelles, appelés à aborder notamment la question des taux d’encadrement et de taille des groupes d’enfants.
*De définition, partagée avec toutes les parties concernées, de la trajectoire de relèvement de l’offre de formation. »
A l’issue de cette concertation, c’est à Nancy que le ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées présentera le plan d'action.
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L’article 10 de la future loi sur le plein emploi
- La politique d’accueil du jeune enfant est conduite dans le cadre d’une stratégie nationale adoptée par arrêté du ministre de la famille et qui détermine notamment les priorités et objectifs nationaux pluriannuels en matière de développement quantitatif et qualitatif de l’offre d’accueil et de formation des professionnels de la petite enfance
- Les communes sont les autorités organisatrices de l’accueil du jeune enfant mais qu’elles peuvent transférer cette compétence aux intercommunalités (EPCI syndicats mixtes). Ce transfert concerne toutes les missions afférant à cette compétence
- Comme autorités organisatrices, les communes doivent recenser les besoins des enfants de moins de trois ans et leurs familles en matière de services aux familles, informer et accompagner les familles ayant un ou plusieurs enfants de cet âge. Lorsqu’elles ont plus de 3500 habitants, elles doivent assurer le pilotage du développement des modes d’accueil via un schéma pluriannuel de maintien et développement de l’offre d’accueil, et assurer le soutien à la qualité d’accueil. Quand elles ont plus de 10 000 habitants, il faut qu’elles se dotent d’un RPE.
- Le schéma pluriannuel des communes dont le contenu est détaillé (inventaire des modes d’accueil, recensement des besoins, modalités de développement quantitatif et qualitatif etc) doit se construire en concertation avec les caf et en cohérence avec les schémas départementaux de services aux familles et sera évalué par les Comité départementaux de services aux familles (CDSF). Si les communes manquaient à leurs obligations, les caf pour y remédier et mettre en place un plan de développement et de maintien de l’offre d’accueil.
- Les RPE voient leurs missions élargies et peuvent désormais, pour le compte des parents employeurs d’assistants maternels et avec leur consentement, accomplir des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales.
- En conformité avec le SDSF, le représentant légal de l’État dans le département peut par arrêté déterminer les zones en déficit d’offre d’accueil et celles proposant une offre d’accueil particulièrement élevée. Les modes d’accueil souhaitant s’implanter dans les premières pourront recevoir des aides spécifiques, pour s'implanter dans les secondes, il faudra recevoir un avis favorable de la part de l’autorité organisatrice.
- Enfin, il est demandé aux régions de tenir compte des besoins de professionnels de la petite enfance (établis au niveau national par arrêté ministériel) dans l’élaboration de leur schéma de formations sanitaires et sociales.
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