Fanny Schosseler, vice-présidente du REMi répond aux attaques contre les micro-crèches
Fanny Schosseler. Évacuons tout de suite la question du privé/public. Et je vais être cash et peut être choquer. Mais soyons clairs, rappelons effectivement que le but du secteur lucratif est de gagner de l'argent, d’assurer sa pérennité et celle des emplois créés. Une entreprise qui veut gagner de l'argent se doit de faire attention à sa réputation et à son image. Donc elle a intérêt, ne serait que pour cela, à bien faire les choses. Évidemment la majorité des gestionnaires qui font bien les choses le font pour bien d’autres raisons ! Et si on veut gagner de l’argent, il y a quand même des secteurs moins engageants que la petite enfance !
Les faits divers en question, s’ils sont avérés méritent d’être révèles et dénoncés. Mais on a affaire à des individus isolés qui ont des comportements inacceptables. Et ce n’est pas la majorité.
Parmi les gestionnaires de micro-crèches du REMi, il y a toutes sortes de profils issus ou pas de la petite enfance. La plupart ne se paient pas ou pas beaucoup plus qu’un SMIC s’ils ne sont pas des professionnels de la petite enfance travaillant auprès des enfants dans les structures.
Comment expliquer alors que des sociétés proposent de monter des projets clefs en mains pour 35 000 euros en promettant une rentabilité de 10% l’an ?
Cela existe effectivement et pour moi c’est très choquant. D’ailleurs, cela fait beaucoup de mal au secteur et cela contribue à jeter le discrédit sur les micro-crèches qui, elles, font bien leur travail.
On voit aussi fleurir des groupes qui proposent des franchises… Est-ce que cela aussi peut participer à cette idée que la rentabilité est plus importante que la qualité ?
Je ne porte pas de jugement sur les crèches en franchise. Je précise juste que pour les crèches Nursea que je dirige, je n’ai pas souhaité aller dans ce sens car je considère qu’il est difficile avec ce système garantir la qualité d’accueil. Ou alors, il faut que franchiseur mette en place de véritables points de contrôle.
Et, il est vrai qu’en termes d’images, cela peut accentuer l’idée de marchandisation et donc être préjudiciable à notre secteur.
Néanmoins pensez-vous que le cadre réglementaire soit suffisant – car il est dérogatoire à celui en vigueur pour les EAJE de taille plus importante.
Franchement, je ne pense pas que les dérogations dont bénéficient les micro-crèches en dégradent la cadre d’accueil. Et d’ailleurs nombre d’entre elles parmi les adhérents du REMi vont au-delà de ce que les normes exigent. Pour moi ce n’est pas le sujet. La souplesse dont nous bénéficions ne concerne que certains points très précis.
Et encore une fois, et je pense aux qualifications des personnels et aux taux d’encadrement notamment, les micro-crèches que nous regroupons considèrent ces normes comme un seuil minimum. Mais il faut aussi noter que des personnels peu qualifiés au départ mais très impliqués sont amenés à monter à compétences. Et dans le contexte de pénurie actuelle, si le recrutement est bien fait, le management bien présent, la formation adaptée, cet assouplissement ne pose pas de problème.
En revanche, je crois qu’une partie du problème réside dans le fait que les micro-crèches sont nombreuses, qu’elles se développent vite avec un volume de gestionnaires importants. Certains n’ont qu’une ou deux micro-crèches. Et plus il y a de gestionnaires, plus le risque de situations de dérapage existe.
Comment limiter ces risques au maximum et ainsi lutter contre cette bronca vis-à-vis des micro-crèches Paje ?
Aujourd’hui, je pense que les micro-crèches ont ce type de difficultés par manque de contrôle. Les PMI sont surchargées et donc pas équipées pour effectuer leurs contrôles nécessaires. Du coup, il y a effectivement des situations qui échappent à leur vigilance. Et ces situations, encore une fois, inacceptables, participent au bad buzz…
Par ailleurs, et nous y travaillons au R.E.Mi nous pensons qu’un contre-feu efficace pourrait être la création d’un label indépendant. Un label transversal qui impliquerait toutes les parties prenantes : gestionnaires, salarié, parents, institutions. Un label de qualité spécifique aux micro-crèches.
Enfin, colle à la peau des micro-crèches, cette idée que c’est un mode d’accueil pour familles aisées…
C’est faux. Archi faux et c’est une idée reçue récurrente. En fait, le prix facial d’une place à temps plein en micro-crèche est inférieur à celui d’une crèche (1600€ vs 2000). Mais le tarif des micro-crèches est plus élevé pour les parents, tout simplement parce que les aides sont moins importantes que pour les crèches et que les familles doivent faire l’avance avant de recevoir les aides de la Caf. C’est la question du reste à charge pour les familles. Leur situation est aussi différente selon que leur entreprise est réservataire ou selon qu’elles ont une place en direct. Les entreprises réservataires de berceaux peuvent faire baisser de 150€ le reste à charge pour les familles. Pas plus car ce serait considéré par le fisc comme un avantage en nature.
Mais il faut noter que les micro-crèches offrent beaucoup de places à temps partiel, une façon d’alléger la coût pour les familles.
NB: cette interview a été publiée pour la première fois dans notre Lettre Hebdo N°48, daté du 23 mai
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