Ecouter ce n'est pas dire oui ! Par Monique Busquet

Psychomotricienne, formatrice petite enfance

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Ecouter est une des nombreuses compétences que les professionnels utilisent et développent au quotidien. L’écoute des enfants, des parents (et des collègues), indispensable à la qualité d’accueil est un travail complexe.

En premier lieu, rappelons qu’écouter ne signifie pas « faire ce qui serait demandé ». Pourtant il y a souvent confusion. Ainsi lorsqu’il est dit d’un enfant qu’il n’écoute pas, cela signifie le plus souvent, qu’il ne fait pas ce qui lui est attendu, comme si écouter était assimilé à obéir et exécuter une demande.
Or écouter, est tout autre chose. C’est porter attention à ce qui est dit, à ce qui est exprimé, que ce soit avec des mots ou par le non-verbal. C’est recevoir, réceptionner, accueillir ce que l’autre partage ou manifeste. C’est le prendre en compte, sans nécessairement dire oui.

L’art de l’écoute, c’est cette capacité à reconnaître et respecter que derrière toute expression, quelle que soit sa forme (silence, critique, plainte, exigence, demande), il y a une ou des raisons « légitimes » qui appartiennent à la personne qui s’exprime. Et cela, même si nous ne comprenons pas, même si cela ne nous parait pas justifié et même si nous n’en connaissons pas les fondements.  De la même façon, un enfant ne tape ou mord jamais sans raison, il y a toujours une tension, une force, une impulsion à l’origine, que nous n’identifions pas toujours.
C’est reconnaître que l’autre est autre, différent de soi, qu’il a son histoire, ses mémoires inconscientes, ses émotions, ses pensées.  C’est l’entendre sans le juger.  

C’est aussi lui faire un retour.  En effet, pour nous sentir écoutés, nous avons tous besoin de ces retours, de cette prise en compte, de ce respect face à ce que nous exprimons.  C’est donc indiquer que nous l’avons entendu, par exemple, que nous comprenons son inquiétude, sa colère, sa demande…
Cela peut être prendre le temps d’échanger, oser engager la conversation sur le sujet et permettre ainsi à l’autre, s’il le souhaite, d’approfondir, d’expliciter, de préciser. Cela peut être également redire soi-même, reformuler ce que l’on a perçu et compris.  Ainsi, le jeune enfant a toujours besoin que ce soit l’adulte qui lui nomme ce qui nous semble se passer pour lui, car il ne le peut pas encore lui-même.

Et c’est aussi répondre lorsqu’il y une demande. Ainsi un parent, qui demande que l’on « oblige son enfant à dormir » ou à manger, a besoin que nous prenions le temps de l’écouter, d’entendre son besoin, son émotion, son inquiétude, s’il peut et a envie d’en dire plus.  Qu’est ce qui l’amène à faire cette demande, voire cette exigence ?  Il y a toujours une raison derrière, un vécu, une expérience, même si nous n’avons pas nous-mêmes besoin de l’identifier.  Cela peut être ensuite pouvoir partager les connaissances actuelles sur le sommeil, sur l’alimentation, sur les raisons qui peuvent faire qu’un enfant dorme moins à la crèche ou mange peu ou sur tout autre point du développement de l’enfant. C’est ainsi montrer que nous prenons en compte sa préoccupation, même si nous ne faisons pas directement ce qui est demandé. Nous pouvons expliquer pourquoi comme professionnelles, nous n’obligeons pas à manger, à dormir, ou que nous ne punissons pas, ne mettons pas l’enfant au coin, ne le remordons pas…  même si les parents le demandent…   Nous racontons comment nous accompagnons l’enfant, par exemple comment nous l’aidons à s’endormir.

Nous pouvons alors réfléchir avec le parent sur les besoins particuliers de leur enfant, sur ce que nous pourrions mettre en place qui aiderait leur enfant. Et continuer à faire des transmissions riches sur ce que vit leur enfant.
Ainsi prendre en compte le parent, ce qu’il exprime et demande n’est pas dire oui à cette demande, ni seulement dire « ne vous inquiétez pas », c’est réellement prendre le temps d’écouter, d’entendre et d’échanger autour de la question.

 
Article rédigé par : Monique Busquet
Publié le 02 juin 2024
Mis à jour le 02 juin 2024