9. Ne pas dire de moi que je suis agressif, capricieux car je ne peux pas être doté de ces intentions à mon âge.

Les réactions que nous catégorisons en tant qu’adulte comme de l’agressivité, des caprices ont uniquement lieu pour des raisons d’immaturité cérébrale, même si les résultats sont parfois douloureux dans ces manifestations comme la morsure, la griffure, se rouler par terre, donner des coups de pieds…
Il faut s’interroger en tant que professionnelle sur le regard que nous portons sur ces émotions et également aider l’enfant à ne pas  les réprimer  en lui montrant comment faire. Et même si les réactions des enfants peuvent nous sembler parfois disproportionnées ou non légitimes, il faut pouvoir adopter un comportement pondéré pour recevoir ce qui se passe.
Les situations de mal être des enfants doivent être mises en rapport avec les différents éléments du  contexte de travail : la disponibilité de l'adulte, l’aménagement de l'espace, les conflits d'objets, la réponse aux pleurs, etc. Il est important de se rappeler qu’un enfant qui ne court pas, qui ne crie pas, qui écoute et qui est n’est pas agité, c’est un adulte !


 
Ce que nous dit la science
En raison de son immaturité cérébrale, l’enfant manque de moyens pour exprimer ce qu’il ressent, ce qu’il veut, comprendre ce qui lui arrive. Il est dans l’action immédiate, sans possibilité de contrôler et subit des impulsions. Quand il est en colère, quand il est triste, angoissé, quand il a peur, ses émotions sont extrêmement intenses, sans avoir la capacité de s’apaiser, de se consoler seul. Les neurones du cortex préfrontal, où s’établit une bonne part du contrôle rationnel des émotions, ne parviennent à maturité qu’à l’âge adulte. Les connexions qui transmettent les informations entre le cortex et le système limbique sont encore peu développées chez l’enfant.

Les applications concrètes     
 • Le rôle de l'adulte est de soutenir l’enfant dans son apprentissage en le valorisant et en l'encourageant. Lorsque l’enfant est envahi par une émotion, et qu’il se met involontairement dans une position non souhaitée, par exemple lorsqu’il tape un autre enfant il est important de lui dire par exemple "tu dois apprendre à contrôler tes mains et à ne pas taper car cela fait mal. Je te fais confiance, tu vas pouvoir y arriver".
• Le rôle de l’adulte est aussi de lui apporter du réconfort et ce quelque  soit la situation aussi désagréable soit-elle pour l’adulte car l’enfant ne peut s'apaiser seul, il a besoin de  réconfort, de douceur même lorsqu'il tape, crie, se roule par terre.
• Le rôle de l’adulte est d’accueillir sa colère sans mauvaise interprétation et aide l’enfant à réguler ses émotions en lui faisant un câlin, ou en détournant son attention en lui proposant un jeu qu’il apprécie par exemple.
• Le rôle de l’adulte est de comprendre que les conflits entre enfants sont une forme d’interactions entre eux, aussi rudimentaires soient elles.
La plupart du temps il s’agit surtout de conflits d’objets, c'est-à-dire vouloir prendre l’objet de l’autre, la place de l’autre, etc.
• Le rôle de l’adulte est de comprendre qu’il ne s’agit pas d’agressivité, mais de l’identification, l’envie d’être l’autre, de faire comme lui avec le même objet, ce qui donne lieu à des interactions négatives : l’enfant tape, proteste, se défend !
• Le rôle de l’adulte est de comprendre que faute de moyens d'expression très élaborés, l'enfant manifeste son besoin de prise de contact avec des moyens un peu rudimentaires.
• Le rôle de l’adulte est de savoir que l’enfant ne cherche pas à le tester , même lorsqu’il se met à pleure facilement « pour un rien » , ou bien lorsque ses exigences semblent  futiles et peuvent agacer.

Questionner les pratiques professionnelles
Par exemple lors d’une interaction négative entre enfants :
-  L’enfant ne peut pas comprendre que c’est le jouet de la crèche
- L’enfant ne peut pas patienter pour l’avoir
- L’enfant ne peut pas comprendre pourquoi il doit réfléchir à ses actes
- L’enfant ne peut pas comprendre si vous vous fâchez après lui

Lorsqu’un enfant prend le jeu d’un autre avec force, il ne cherche pas à faire mal, à prendre le pouvoir sur l’autre : ce n’est que la conséquence involontaire.
Son impatience et son besoin immédiat vont le conduire à prendre l’objet de force mais sans aucune intention de nuire.
Il est attiré par l’objet, le mouvement généré par son utilisation. Il veut l’objet, alors il le prend : son acte n’est pas réfléchi. Il est en incapacité de se projeter sur les conséquences possibles de son acte, de la tristesse qu’il va générer chez l’autre enfant.

Pour se mettre à la place de l’autre, il faudra encore attendre quelques années : c’est uniquement à partir de 4 ou 5 ans que l’enfant est capable de réaliser que l’autre peut penser différemment de lui.

Par exemple lorsque l’enfant n’écoute pas ce que vous lui dites ou ne fait pas ce que vous lui demandez de faire :
- L’enfant ne peut pas comprendre qu’il fait partie d’un groupe
- L’enfant ne peut pas comprendre que dans 5 minutes il devra arrêter de jouer car c’est l’heure de passer à autre chose
- L’enfant ne peut pas contrôler son corps pour rester assis pendant tout le temps de chanson ou pendant le temps d’histoire que vous racontez
- L’enfant ne peut pas arrêter de monter sur le garage parce que cela fait dix fois que vous lui expliquez qu’il ne doit pas le faire

L’enfant est incapable d’avoir du contrôle émotionnel, du contrôle cognitif, du contrôle moteur. On ne peut pas demander à un enfant d'arrêter de faire des choses si son cerveau ne peut pas le faire.


 

Article rédigé par : Marie Defrance
Publié le 27 mars 2023
Mis à jour le 09 juin 2023