Les grands pédagogues en bande dessinée
Au début de l’année 2022, a été publiée une bande dessinée : « Les enfants d’abord. Janusz Korczak, une vie au service de l’éducation et des droits de l’enfant. » Le scénariste Stéphane Tamaillon et l’illustratrice Priscilla Horviller retracent la vie de l’écrivain et du médecin dans ses différentes missions de pédiatre, de professeur et de directeur d’orphelinat. Dix ans plus tôt, avait été publiée une première bande dessinée intitulée « Korczak. Pour que vivent les enfants », dont le texte était signé par le chercheur en sciences de l’éducation, Philippe Meirieu, grand admirateur de l’inspirateur des droits de l’enfant. Les dessins sont ceux de l’illustrateur non moins célèbre, Pef. Elle n’est pas aussi détaillée car elle s’adresse aussi aux enfants. Ces deux versions complémentaires ne remplacent pas la lecture des écrits de Korczak mais permettent de découvrir le parcours et les idées de ce médecin polonais dévoué à la cause des enfants jusqu’à en mourir tragiquement.
Dans les deux bandes dessinées, un personnage est mis à l’honneur, le roi Mathias Ier, héros pour enfants inventé par Korczak et devenu un classique de la littérature enfantine polonaise.
Quelle est l’œuvre du couple Freinet ?
Le nom de Freinet est associé aux méthodes actives qui ont émergé au début du XXe siècle. La bande dessinée signée Sophie Tardy-Joubert pour le texte et Aleksi Cavaillez pour le dessin prend soin d’emblée d’annoncer les deux prénoms, celui d’un instituteur et d’une institutrice qui, ensemble, ont posé les bases d’une méthode d’éducation basée sur l’initiative individuelle et la coopération. Le lien avec l’évolution du mouvement Freinet est fait dès la première page en mettant en scène une enseignante utilisant les techniques Freinet dans sa classe de nos jours. Dans le contexte historique et politique de l’entre-deux-guerres jusqu’aux années 1960, est retracé l’itinéraire plein d’embûches de ces deux enseignants et militants communistes obligés de quitter le secteur public. Leur histoire nous éloigne de la toute petite enfance mais elle nous plonge dans des questionnements sur la finalité de l’éducation et nous fait partager les espoirs apportés par les méthodes actives tout au long du XXe siècle.
Connaît-on la vie tourmentée de Maria Montessori ?
Deux bandes dessinées sont parues cette année sur Maria Montessori. Aucune des deux ne fait l’impasse, comme c’est souvent le cas dans d’autres biographies, sur les années sombres pendant lesquelles la médecin et pédagogue, par opportunisme ou par nécessité, a collaboré avec le dictateur Mussolini, avant de lui tourner le dos et de s’enfuir.
Dans « L’école de vie », la biographie est d’une grande qualité, le réalisme des dessins s’ajoutant à la précision des références dans le texte. Caroline Lepeu est une autrice mais aussi une éducatrice montessorienne, ce qui explique la richesse de ses références. Les illustrations de Jérôme Mondolini qui nous font suivre les combats et les voyages de Maria Montessori sont magistrales.
Dans « La maison des enfants », le scénario d’Halim est fait d’allers-retours entre différentes époques et le style de l’illustratrice italienne Caterina Zandonella met une touche imaginaire un peu décalée par rapport à l’ambiance montessorienne. La biographie tourne autour de la période hollandaise, ce qui permet de faire connaissance d’une petite élève de l’école Montessori d’Amsterdam qui s’appelait Anne Frank. Cette anecdote qui est juste en côtoie une autre qui est invraisemblable : l’impossible rencontre entre les docteurs Montessori et Seguin. La mise en valeur du rôle joué par le fils de la pédagogue est intéressante. Alors, faut-il choisir ? Maria Montessori est une figure suffisamment complexe et son œuvre suffisamment riche pour inspirer deux bandes dessinées différentes mais « L’école de la vie » reste plus instructive que « La maison des enfants ».
Les cinq livres ont en commun de situer le cheminement pédagogique de ces personnalités dans le contexte des grands bouleversements historiques et politiques du XXe siècle. Une manière de rappeler que les méthodes pédagogiques prennent tout leur sens en lien avec les débats idéologiques de l’époque à laquelle elles naissent.
Références des BD citées :
-Les enfants d’abord. Janusz Korczak, une vie au service de la pédagogie et des droits de l’enfant, de Stéphane Tamaillon et Priscilla Horviller, Steinkis, 2022
-Korczak : Pour que les enfants vivent, de Philippe Meirieu et Pef, Rue du monde, 2012
-Élise et Célestin Freinet, de Sophie Tardy-Joubert et Aleksi Cavaillez, l’éducation en liberté, Delcourt, 2022
-Maria Montessori l’école de vie, de Caroline Lepeu et Jérôme Mondolini, MARAbulles, 2022
-La maison des enfants. Maria Montessori, observer pour apprendre, de Halim et Caterina Zandonella, Steinkis, 2022
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