Les bosses (hématomes) : des petits bobos à ne pas négliger

Tomber, se cogner contre quelque chose ou quelqu’un, fait partie du quotidien des jeunes enfants chez qui les bosses (ou hématomes) ne sont pas rares. Si elles sont le plus souvent sans gravité et nécessitent peu de soins, la vigilance reste de mise quel que soit l’incident car elles peuvent s’accompagner d’autres symptômes révélateurs d’un traumatisme plus important. On fait le point avec le Dr Jean-Baptiste Bertrand, pédiatre à la maternité néonatologie de Saint-Cloud, qui intervient au sein de crèches associatives.
Les spécificités de l’hématome
Causes
Une bosse, de son nom médical hématome, est formée par une hémorragie localisée suite à un choc ayant entraîné une fissure des vaisseaux sanguins. Il s’agit du même mécanisme que pour une plaie, à la différence que le sang reste sous la peau.
« La plupart des hématomes sont provoqués par un traumatisme, explique le Dr Bertrand, sauf dans le cas de rares maladies qui peuvent en faire apparaître sans choc ou suite à des chocs minimes : troubles de la coagulation (hémophilie, etc.), purpura rhumatoïde ou « maladie de Henoch-Schönlein », (maladie inflammatoire des vaisseaux sanguins qui touche essentiellement les enfants) et autres atteintes rares. »

Formes
Un hématome est une bosse de couleur bleue - à distinguer de l’ecchymose, qui fait aussi apparaître un bleu, mais reste plate. Au fil de sa guérison, il peut prendre successivement d’autres couleurs (violet, jaune...), le temps que l’organisme évacue le sang sorti des vaisseaux.
A noter : après avoir pris un coup sur le front par exemple, les enfants se retrouvent parfois avec une énorme bosse qu’on appelle familièrement « un œuf de pigeon ». « Aussi impressionnant qu’il puisse paraître, il n’est pas forcément signe de gravité pour autant », précise-t-il.

Les bons gestes à adopter en cas de bosse
• Rassurer l’enfant et l’isoler de l’agitation, qui participe au stress.
• Appliquer de la glace préalablement enveloppée dans une serviette ou un torchon. Ne jamais poser la glace en contact direct avec la peau (pour éviter tout risque d'engelure).
• Eventuellement maintenir une compression ou appliquer un pansement compressif sur la bosse. Mais il faut alors s’assurer de ne pas faire plus mal à l’enfant et ne pas comprimer trop longtemps (environ 10 minutes) - à voir au cas par cas.
« La glace et la compression sont tous deux des mécanismes qui permettent de limiter l’écoulement de sang sous la peau, détaille le médecin. Au contact du froid, les vaisseaux superficiels se resserrent (vasoconstriction) et moins de sang circule. De même appuyer sur les vaisseaux empêche le sang de sortir. » Le but est de réduire la taille de l’hématome : plus que pour une raison esthétique, cela a une visée antalgique car plus l’hématome est gros, plus il peut être douloureux.  
• Donner du doliprane (après autorisation des parents) si la douleur est très forte.
• Certains utilisent de l’Arnica : par voie cutanée sous forme de gel Arnica à appliquer, ou par voie orale sous forme de granules homéopathiques Arnica montana (à partir de 18 mois).

Les points de vigilance qui s’appliquent quel que soit le cas
1) Le mécanisme du traumatisme
Même si ce n’est pas évident, surtout en collectivité où les adultes n’ont pas l’œil sur chaque enfant à chaque instant, il faut essayer de déterminer la « cinétique du traumatisme ». C’est-à-dire la nature même du choc : caractéristique de l’obstacle (objet pointu, plat, revêtement…), hauteur du choc ou de la chute, vitesse du choc contre l'obstacle, etc. Si l’adulte en charge de l’enfant n’a pas vu la scène, demander s’il y a des témoins. Comme l’explique le médecin, les professionnels ne doivent pas être gênés de dire aux parents qu’ils n’ont pas vu l'enfant se faire mal. En effet, savoir que la nature du choc est inconnue permettra aux parents de rester plus vigilants les heures suivantes.

2) L’après traumatisme
Le pic de douleur a lieu en général au moment du choc. « Sur le coup, l’enfant peut crier fort, pleurer et se plaindre de la douleur. Mais si on arrive à vite le rassurer et le distraire, il retrouve généralement son calme au bout de quelques minutes, indique-t-il. L’hématome est ensuite douloureux lors de la mobilisation ou si on le touche ». Si l’enfant ne se calme pas au bout de 10-15 minutes, cela peut être signe d’une forme plus grave telle une fracture, ou autre, selon la localisation de l’hématome. Il est alors conseillé d’appeler le SAMU. De la même façon, une évolution de plus en plus douloureuse avec augmentation du volume de l’hématome dans les jours qui suivent n’est pas normale et représente un motif de consultation.

Et de manière générale, il ne faut pas hésiter à consulter un médecin dans le cas d’un hématome chez un bébé âgé de moins de 6 mois.

Les localisations de l’hématome dont il faut se méfier plus particulièrement
Le crâne. Une vigilance accrue doit être observée après un coup sur le crâne, d’autant plus si on n’a pas vu l’incident se produire. « Bien sûr, l’enfant peut être un peu choqué sur le moment, mais il doit reprendre un rythme normal dans les minutes qui suivent, » rappelle le Dr Bertrand. Il faut d’abord s’assurer qu’il n’y a pas eu de perte de connaissance au moment du choc et rester attentif à l’apparition de symptômes pendant les 24 heures qui suivent l’incident : vomissements, comportements inhabituels (enfant trop excité ou au contraire très apathique). Chacun représente un motif de consultation en urgence car ils peuvent être le signe d’un traumatisme crânien avec complications. Au-delà de ces 24 heures, le risque de complications est minime.

Les yeux. Les enfants aussi peuvent se faire un œil au beurre noir. Il faut être méfiant si l’œil ne s’ouvre plus et ne pas hésiter à consulter en urgence. L’enjeu est de déterminer s’il s’agit seulement d’un hématome superficiel des paupières ou si l’œil est touché ou la vision altérée.

Le pavillon de l’oreille, c’est-à-dire la partie externe de l’oreille. Un hématome volumineux à cet endroit peut nécessiter une intervention aux urgences pour drainer le sang de la bosse et ainsi éviter des complications plus sévères.

Le nez. En cas d’hématome de la cloison nasale (le cartilage qui se situe entre les deux narines), une collection de sang peut être visible à travers la narine avec déviation de la cloison nasale. Un avis ORL devra être demandé en urgence.

Les dents. On pense parfois qu’un choc sur les dents d’un enfant n’est pas grave si cela arrive sur ses dents de lait. Mais il peut avoir des conséquences sur le long terme. Il vaut mieux demander l’avis d’un dentiste pour savoir si la racine est touchée ou pas. (Voir la fiche « Gare à la chute sur les dents »)

Les parties génitales. Cela arrive rarement, mais si un petit garçon se retrouve avec un hématome au niveau des testicules, une évaluation médicale est indispensable.

Les ongles. Un hématome sous l’ongle peut faire très mal. On peut demander l’avis d’un médecin, voire pratiquer des petits soins pour vider l’hématome et ainsi soulager la douleur.
Article rédigé par : Armelle Bérard Bergery
Publié le 07 mai 2019
Mis à jour le 25 novembre 2020