« Jardinière d’enfants » . Par Bernadette Moussy

EJE, formatrice (enseignement des courants pédagogiques)

Ecolo Crèche
petite fille dans l
Jardinière d'enfants. A une journée organisée à Ecolo-crèche début juin, j’ai été présentée avec ce titre que j’ai obtenu en 1962. Je rappelle que les jardinières d’enfants sont devenues éducateurs de jeunes enfants en 1973. J’ai donc eu l’impression de remonter dans le temps. Cet intitulé, avec sa dimension écologique, pourrait se justifier à nouveau. Je ressens donc le besoin de rappeler le sens de ce terme et pourquoi pas son actualité.

C’est Frédéric Fröbel, fondateur des jardins d’enfants en 1836, qui l’a choisi pour ses éducatrices. Le jardin d’enfants ne signifie pas un jardin où se trouvent des enfants mais un lieu où ils sont éduqués et soignés comme seraient des plantes qui ont tout le potentiel pour grandir par elles-mêmes. Cette éducation respecte le processus de leur évolution et leur propose un environnement de qualité où ils font des observations et des expériences. De plus les enfants sont en contact avec la nature qu’ils observent et dont ils prennent soin. Ils découvrent ainsi les lois de la vie apprennent à être responsables et à partager leurs produits. Le terme de jardin a ainsi une double dimension. Les enfants y sont « cultivés » et l’on redécouvre le passage de nature à culture cher à Jean Jacques Rousseau, et l’enfant à son tour, a son jardin où il rencontre la nature qui le ressource.

Lors de la sélection avant mon entrée en formation, je fus surprise par certaines questions concernant l’observation de la nature. Heureusement j’avais passé mes vacances à la campagne. Le premier après-midi de la rentrée nos formatrices nous ont emmenées dans un parc. Je me souviens avoir partagé avec une autre étudiante nos impressions devant la beauté d’un arbre. J’ai compris plus tard que la communication avec l’autre devant la beauté de la nature pouvait être les prémisses de ce que j’aurai à partager au sujet de mes observations sur les enfants. Lors de la première année de la formation, nous devions choisir un arbre que nous allions observer toute l’année, en même temps que nous faisions une monographie d’enfant. Une dimension importante de notre formation n’était-elle pas d’apprendre à observer le vivant ?
Qui aurait pu dire à cette époque, que quelques dizaines d’années plus tard, sortir les petits enfants devrait être l’objet d’une autorisation et que certaines directrices de crèche devraient braver des interdictions pour que les enfants marchent dans l’herbe. Que, faire des observations sur les animaux avec les enfants ou préparer un gâteau, seraient interdits par mesure d’hygiène ou peur d’empoisonnement ? Nous étions loin d’imaginer la fabrication de revêtements souples en matières toxiques « pour que les enfants ne se fassent pas mal en tombant » et l’emploi, là encore, de produits toxiques pour nettoyer les jouets et les locaux.

Heureusement il y a actuellement des réactions de bon sens,  basées sur des connaissances reconnues, qui nous ouvrent des possible « retours à la nature ». Dans les institutions labélisées d’Ecolo-crèche, en dehors des pratiques d’utilisation de produits de nettoyage non toxiques, les sorties vers un extérieur même urbain sont organisées, sans oublier toutes celles faites dans le parc voisin et l’introduction de la nature dans des jardinières en bois. Il y a aussi les quelques institutions, et là je pense à la halte-garderie du 17eme arrondissement de Paris, où les enfants sont dehors dans une proportion de 80% du temps. L’évènement de la journée n’est pas de sortir, mais de rentrer ! Les enfants ne sont pas malades, le personnel non plus et les parents sont heureux de retrouver leur enfant détendu. Lors d’une visite que j’ai faite dans cette halte-garderie je n’y ai entendu aucune interdiction. Une ambiance de paix règne sur le personnel et les enfants, pas seulement à cause du contact avec la nature, mais parce que chacun va à son propre chemin.

Les interdictions de contact avec la nature en vertu du fameux principe de précaution sont dans la tête de certains responsables. Et pourtant il n’y a pas d’interdiction formelle hygiéniste à sortir les enfants au contraire. N’hésitons pas à redevenir jardiniers.

 
Article rédigé par : Bernadette Moussy
Publié le 13 juillet 2018
Mis à jour le 13 juillet 2018