C’est ma place. Par Jean-Robert Appell
Educateur de jeunes enfants, formateur à l'association Pikler-Loczy
Pour des tout-petits très dépendants de l’adulte, la question de la place est essentielle, c’est une grande question dans l’organisation de nos institutions, permettre à chacun d’avoir sa place. La question de la place est l’une des causes de l’agressivité chez l’être humain, si je pense ne pas avoir ma place, je peux développer de l’agressivité contre moi qui ne suis pas assez bon pour avoir une place ou contre les autres qui ne me laissent pas cette place. Ce que nous appelons « jalousie » qui ressemble beaucoup à un jugement, c’est peut-être tout simplement la peur de perdre sa place. Pour les jeunes enfants, nous parlons aussi d’individualisation, reconnaître chacun selon ses besoins, ce n’est pas une mince affaire.
En collectivité, l’enfant aura le sentiment que sa place est préservée lorsque :
- il est reconnu dans ses besoins,
- il est reconnu dans ses émotions,
- il est regardé avec attention,
- il peut s’appuyer sur un adulte connu et sécurisant pour lui,
- il est « porté » psychiquement par un adulte qui garantit la continuité de son histoire institutionnelle,
- nous l’appelons par son prénom, que nous lui disons « je » et « tu » lorsque nous nous adressons à lui,
- son jeu est respecté,
- la place de ses parents sera respectée et le lien préservé.
Nous pouvons aussi réfléchir à sa place à table en collectivité, symboliquement, l’enfant possède un espace à lui dans l’institution, il a sa place ! Il est amusant de voir que nous ne sommes pas toujours très attentifs aux questions de place à table alors que la plupart des adultes mangent toujours à la même place en famille. Je passe la question de choisir et de négocier sa place avant 3 ans qui n’est pas non plus très simple. Il en sera de même pour la place du lit pour dormir, condition importante pour trouver le sommeil en toute sécurité. La continuité des repères favorise certainement le sentiment de connu et d’appartenance.
Nous pourrions continuer la réflexion sur la question de la place dans le groupe, celui qui est « gentil », celui qui n’est pas « gentil », toutes ces identités imposées à l’enfant et qui lui donne une place, certes, mais « enfermante et jugeante ».
Mais aussi les réflexions valorisantes pour certains enfants - « il est beau ton dessin » - et pas à d’autres etc. Il est vrai que la question de la place pour l’enfant en institution, par modèle des emboîtements, commence par celle des professionnels. Actuellement, ce sont plutôt les questions financières qui prennent beaucoup de place dans nos institutions.
Si vous le souhaitez, je vous laisse de la place pour compléter la liste ci-dessus de ce qui permet de préserver la place de l’enfant. Personnellement, je vous retrouverai à cette place dans un mois.
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