Aux Diablotins, on fait la crèche buissonnière !
Pour les grands, la crèche buissonnière
L'idée germe il y a maintenant 5 ans. Au détour d'une balade en forêt, elle construit une cabane. Rien d'extraordinaire. Quelques branches savamment posées au pied d'un arbre à quelques encablures de la crèche. Yves Duteil aurait pu en faire une chanson. Et pourtant, cette cabane change tout au quotidien de la crèche. C'est grâce à elle que naît le concept qui fédère aujourd'hui les 20 enfants, les 33 familles et toute l'équipe pédagogique : la crèche buissonnière.
« Le quotidien de la crèche a toujours été en extérieur. Après tout, nous avons la chance d'avoir un immense jardin. Mais ce n'était pas suffisant, » rappelle-t-elle. « Avec la crèche buissonnière, deux professionnelles et 4 enfants du groupe des grands s'échappent de la structure, pour une journée ou une demi-journée (selon la disponibilité de l'équipe) et se rendent à la cabane. Ces sorties se font quelles que soient les conditions météorologiques. Il nous est arrivé de partir en raquettes parce qu'il avait beaucoup neigé !». Au programme de ces sorties pas tout à fait comme les autres : un départ à pieds de la crèche, 40 minutes de randonnée pour petits et grands petons, une tisane à l'arrivée, un déjeuner ou un goûter à l'ombre des sapins, une sieste dans un hamac ou à même le sol, et surtout de la liberté, beaucoup de liberté. Selon Emmanuelle Sambuis, c'est même primordial : c'est parce que les enfants sont libres de découvrir la nature qu'ils en tirent réellement tous les bénéfices.
À la crèche buissonnière, pas de consignes !
C'est pourquoi après avoir été guidée pendant deux ans par une accompagnatrice de montagne (dont le budget a été financé à 80 % par la conseil départemental), l'équipe a décidé de partir en toute autonomie. L'objectif : laisser les enfants faire ce qu'ils veulent qu'il s'agisse de jouer dans les flaques ou la neige, de ramasser des trésors ou de grimper aux arbres... « A la cabane, il n'y a pas de consignes, si ce n'est que les enfants savent qu'ils doivent toujours pouvoir voir un adulte », souligne-t-elle tout en rappelant que la sécurité est évidemment toujours la priorité, mais qu'avec des groupes aussi restreints, le travail des professionnelles est nettement simplifié.
Des consignes, il n'y en a d'ailleurs pas besoin. D'abord, parce que l'équipe prône le risque mesuré et nécessaire, essentiel pour que les enfants puissent être plus autonomes. « La nature est le meilleur outil pour permettre de prendre des risques. On ne va pas interdire aux enfants de grimper aux arbres, mais on ne va pas les aider non plus. Ils font seulement ce qu'ils peuvent faire », explique-t-elle en rappelant que cette posture n'a pas toujours été évidente pour les salariées. Ensuite, les consignes sont finalement superflues car la nature offre tout ce qu'il faut pour que les enfants fassent spontanément de l'itinérance ludique. « En forêt, on peut déployer tous les axes de cette pédagogie, gratuitement en plus », s'enthousiasme la directrice de crèche. Et d'expliquer : « La motricité, les constructions, les manipulations : tout est possible grâce à la montagne et ce qu'elle a à offrir. Le côté artistique est aussi très présent avec les ateliers de Land Art que nous proposons toujours aux enfants ».
Des apprentissages essentiels et des liens précieux
Les bénéfices ? On pourrait en faire un inventaire à la Prévert. Au contact de la nature, les enfants développent leur système immunitaire, leur santé physique, leurs intelligences émotionnelle, sensorielle et cognitive, leurs capacités motrices, leur créativité, leur imagination, leur langage, leur confiance en eux, leur logique, leur autonomie... Mais ils créent surtout du lien. « La plus grande évolution qu'on ait pu observer chez les enfants ayant participé à la crèche buissonnière, c'est leur faculté à coopérer. A la crèche, ils évoluent dans un espace inter-âges, une grande pièce où ils sont tous rassemblés et où la coopération est parfois difficile. En forêt, les enfants s'entre-aident pour grimper aux arbres, notamment. C'est un comportement complètement différent.». Et si les relations entre petits se tissent, celles entre enfants accueillis et professionnelles aussi : « Dans ce cadre si privilégié, on apprend à connaître les enfants différemment. On est presque sur des temps individuels et c'est extrêmement précieux », continue-t-elle.
Une nouvelle philosophie professionnelle
Si les plus petits ne sont pas encore à même de faire la crèche buissonnière, ils ne sont pas en reste. L'équipe veille ainsi à ce qu'eux aussi aient leur juste dose de nature. À cette fin, l'équipe a bénéficié, dans le cadre de son plan de formation, d'une initiation à l'approche nordique de la petite enfance grâce à une formatrice danoise. Son apport : des connaissances théoriques sur l'immersion dans la nature chez les tout-petits, mais aussi des outils, des idées d'ateliers (réalisation d'herbiers, de mobiles pour les bébés à partir d'éléments naturels). Son passage a aussi permis d'instiller une nouvelle philosophie, déjà sous-jacente dans la structure : le retour à la nature, à l'essentiel. « Nous sommes vraiment dans une dynamique de décélération avec les enfants. Nous avons très peu de jouets achetés dans le commerce, par exemple. Nous privilégions la récup' et les petits jouent avec ce qu'ils trouvent dans leur environnement, à leur rythme », souligne Emmanuelle Sambuis. La Slow Life version bébé, en somme.
Piscine de boue, sieste en extérieur et parcours sensoriel
Mais qui dit slow life, ne dit pas pour autant se tourner les pouces ! Bien au contraire, pour permettre aux plus jeunes de vivre eux aussi au grand air, les professionnelles, comme les parents d'ailleurs, n'ont pas lésiné sur les efforts. Ainsi, au printemps dernier, tout le jardin de la crèche a été aménagé pour favoriser l'itinérance ludique, la vie en extérieur et la détente. Dans cet espace, on retrouve tour à tour, un parcours sensoriel, un bus en bois recyclé, un « shelter » à base de palettes pour faire la sieste dehors, et même... une piscine de boue !
Là encore, Emmanuelle Sambuis ne peut constater que des effets positifs sur les petits et les grands. « Il y a beaucoup moins de disputes, le jardin est vraiment un espace idéal pour apprendre le vivre ensemble », constate-t-elle. Les petits, qui eux aussi défient parfois les éléments pour être quotidiennement en extérieur, en redemandent, allant même jusqu'à jouer des coudes pour leur place dans le shelter. Mais malheureusement, l'abri ne peut accueillir que 5 à 6 enfants à la fois.
Une soutien total des parents
Les pros, quant à elle, continuent à s'enthousiasmer pour le projet, mais ce pour quoi la directrice se félicite surtout, c'est pour l'adhésion des parents. « Sur les 33 familles, 80% sont à fond, nous font totalement confiance, même si certains s'enthousiasment moins pour la piscine de boue », conclut-elle. Ce soutien est d'ailleurs d'autant plus nécessaire qu'aux Diablotins, les parents sont les employeurs. Ce sont donc eux qui autorisent ou non les projets. Mais sur ce point, Emmanuelle Sambuis n'a plus de doute : à Noël dernier, quatre enfants du groupe des grands ont reçu des sacs à dos pour leur randonnée à la cabane et les familles vont même jusqu'à faire la promenade ensemble le week-end. Pas de doute, aux Diablotins, tout le monde veut faire la crèche buissonnière !
Le site de la crèche des Diablotins : https://www.les-diablotins.fr/
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