Modes d’accueil : le point sur les dernières annonces du gouvernement

Lundi 28 septembre, Adrien Taquet, secrétaire d’état en charge de l’Enfance et des Familles, a prononcé un discours sur les 1000 premiers jours de l’enfant, en direct sur Facebook. Il en a profité pour détailler les mesures qui seront mises en place, suite au rapport des 1000 jours rendu par la Commission Cyrulnik, le 8 septembre dernier. Des annonces à destination des parents, mais également des pros de la petite enfance. Revue de détails.
Améliorer les conditions de travail et de rémunération des assistants maternels
Adrien Taquet l’avait annoncé lors d’un entretien accordé au JDD le week-end dernier, et l’a confirmé lundi. Les assistantes maternelles pourront accueillir un enfant supplémentaire, en urgence, une semaine par mois. Il avait expliqué, lors de son interview au JDD, que cela concernerait les « 280.000 assistantes maternelles, habituellement habilitées à garder au maximum quatre enfants ». Dans son discours de lundi, pas de précision sur le sujet. Cette mesure concerne-t-elle toutes les assistantes maternelles agréées ? A quels parents s’adresse-t-elle ? Qu’entend-on par « urgence » ? Cela reste encore bien flou d’autant plus que les assistantes maternelles peuvent déjà dans certains cas accueillir des enfants en plus, notamment pour remplacer une autre assistante maternelle.

Par ailleurs, cette mesure ne va pas dans le sens du rapport sur les métiers du lien des députés Bruno Bonnell et de François Ruffin. Ces derniers estiment que les salaires doivent être revalorisés, l’idée n’étant pas que les assistantes maternelles augmentent forcément leur capacité d’accueil pour être mieux payées. Bruno Bonnell, dans une interview donnée aux pros de la petite enfance, avait ainsi confié, à la lumière des témoignages recueillis pour concevoir le rapport, que « 3 enfants c’est gérable dans de bonnes conditions d’accueil, avec 4 enfants c’est beaucoup plus difficile de faire un bon travail d’accueil surtout si les enfants sont âgés de 4 mois à 3 ans ! »

« Nous leur faciliterons l’accès à la formation et à la médecine du travail de droit commun », a également évoqué Adrien Taquet. A noter que la question de la médecine du travail est une mesure prévue par le projet de loi ASAP, en cours de discussion à l’Assemblée nationale.

Adrien Taquet a par ailleurs tenu à remercier les assistants maternels pour leur implication et engagement auprès des familles et des enfants pendant cette crise sanitaire compliquée que nous vivons. 

L’adhésion à la charte nationale d’accueil du jeune enfant obligatoire
D’ici à fin 2020, les EAJE et les assistantes maternelles devront adopter et appliquer la charte nationale d’accueil du jeune enfant. « Cela deviendra même une condition d’octroi des autorisations et des agréments », a précisé Adrien Taquet. La charte, issue du rapport Giampino  et validée par le HCFEA, aura une valeur juridique. Elle sera opposable et en conséquence, il pourra y avoir des contrôles pour vérifier que ses principes sont bien respectés.

Modes de garde : une plateforme à destination des parents
« Nous allons également simplifier la vie des parents, avec la mise en place d’ici l’été d’une plateforme leur permettant de savoir quelles sont les places disponibles près de chez eux, mode d’accueil par mode d’accueil », a indiqué Adrien Taquet. Va-t-on rendre obligatoire pour tous les pros (EAJE et assistants maternels) la déclaration de leurs disponibilités sur cette plateforme ? Pas de précisions… Mais cette annonce fait écho au projet de loi ASAP (ex-ESSOC). Un amendement (638) au projet de loi ASAP ,prévoyant l’obligation pour les EAJE et les assistants maternels de déclarer leurs disponibilités afin d’alimenter le site monenfant.fr, portail proposant aux parents un service de recherche géolocalisée d’un mode d’accueil, a en effet été déposé début septembre. A noter que cette mesure, qui avait été intégrée dans un premier temps au PLFSS 2020, avait été retoquée par le Conseil constitutionnel. 

Expérimentation d’horaires atypiques dans des lieux d’accueil
« Nous allons lancer une expérimentation sur quelques territoires candidats pour la mise en œuvre de solutions d'accueil à horaires atypiques, en poussant la logique plus loin encore que ce qui se fait aujourd’hui, par exemple en nous inspirant de ce qui se fait en Finlande, avec des crèches 24/7 dont j’ai pu voir le succès, en particulier auprès de personnes dans des situations socialement et professionnellement précaires », a informé Adrien Taquet. Dans le cadre de cette future mesure, il s’est rendu ce matin dans une nouvelle crèche située au marché d’intérêt national (MIN) de Rungis qui propose des horaires atypiques aux parents-salariés des entreprises du marché.

35 millions d’euros pour la PMI
Le gouvernement s’engage pour les PMI. « Nous augmentons et nous accélérons en parallèle l’effort initié cette année pour renforcer les Protections maternelles et infantiles (PMI) : après avoir investi 15 millions d’euros dans 30 départements en 2020, ce sont 35 millions d’euros qui seront consacrés au total en 2021 au renforcement des PMI dans 70 départements. Cet investissement doit permettre aux PMI de recruter du personnel -même si je sais que le sujet des recrutements est bien plus complexe, et nous nous y attelons par ailleurs-, et de mieux s’articuler avec les maternités pour mettre fin à cette rupture qui existe entre le suivi à l’hôpital et à domicile », promet Adrien Taquet. 

Pour rappel, la députée Michèle Peyron avait rendu en 2019 un rapport alarmant sur la PMI (« Pour sauver la PMI, agissons dès maintenant ») à Adrien Taquet. Le constat était sans appel : manque de moyens, problèmes de recrutement avec le départ à la retraite en 2020 de 2/3 des médecins de PMI, de plus en plus de missions dépassant leur cœur de métier… Adrien Taquet s’était alors engagé à refonder la PMI et à mettre œuvre certaines mesures du rapport.

Cette somme, non négligeable, dégagée par l’Etat sera-t-elle exclusivement consacrée au soutien à la parentalité ou des actions autour des modes d’accueil seront-elles menées ? Est-ce qu’une partie des prérogatives de la PMI (agrément des assistantes maternelles et des EAJE, contrôle et suivi de ces pros et des structures) sera confiée à la Cnaf ? A suivre…

Des groupes de paroles pour les jeunes parents avec la Cnaf
Dans le cadre du parcours de 1000 jours, pour accompagner les jeunes parents, tout particulièrement ceux qui sont seuls, sans soutien, le gouvernement souhaite mettre en place des groupes de parole entre pairs avec la Cnaf.
« Nous travaillons avec la CNAF pour progressivement proposer à chaque parent des groupes de parole entre pairs. Des expériences en France et à l’étranger ont montré comment ces groupes pouvaient permettre de sortir de l’isolement et de développer ses compétences parentales », a annoncé Adrien Taquet.

48 millions d’euros pour la formation des professionnels de la petite enfance
« Nous lancerons un grand plan de formation pour les 600.000 professionnels de la petite enfance, avec des modules sur l'éveil au langage ou à la culture », a réaffirmé Adrien Taquet. 
Cette mesure, prévue dans la stratégie nationale pour prévenir et lutter contre la pauvreté en France, annoncée en septembre 2018 par Emmanuel Macron, a été reprise dans le rapport des 1000 premiers jours. Le but : renforcer la formation initiale et continue des pros de la petite enfance avec également la mise en place de formations aux 1000 jours accréditées et validantes. Les premières formations débutent cet automne et s’intensifieront l’année prochaine.
Lors des questions-réponses à l’issue du Facebook live, Adrien Taquet a précisé que 48 millions d'euros seront consacrés à ce vaste plan de formation dont le contenu sera réactualisé. Le gouvernement s’inscrit dans une démarche de revalorisation des métiers de la petite enfance, dont on sait qu’ils sont primordiaux, avec l’idée de susciter des vocations et d’offrir un accueil de qualité aux parents.  

Le « référent parcours 1000 jours » bientôt expérimenté
Dans le cadre du parcours 1000 jours spécifique pour les plus fragiles, le gouvernement prévoit l’expérimentation d’un « référent parcours 1000 jours », dès 2021, dans plusieurs régions « pour les situations parentales les plus complexes. » « Ces professionnels, sage-femme ou autre selon les besoins identifiés, auront pour mission de coordonner l’ensemble des acteurs impliqués dans le suivi des parents et de l’enfant », a-t-il détaillé. A quels professionnels incomberont cette mission ? Par qui seront-ils nommés ? A qui rapporteront-ils ? De nombreuses questions encore en suspens…

Réforme du cadre normatif des modes d’accueil : la réflexion se poursuit 
« Nous sommes par ailleurs engagés dans une démarche plus globale de clarification et de mise en cohérence des normes -j’aurai l’occasion d’y revenir prochainement-, afin de faciliter, grâce à des règles plus claires mais pas moins exigeantes, la création de places et les conditions d‘exercice pour les assistants maternels », a précisé le secrétaire d’Etat à l’Enfance et aux Familles.
Adrien Taquet évoque ici le projet de loi ASAP (ex-ESSOC), qui prévoit notamment la simplification du cadre normatif applicable aux modes d’accueil du jeune enfant. 

Les mesures concernant principalement les parents
  • Les congés parentaux : Emmanuel Macron a annoncé la semaine dernière l’allongement du congé paternité, ouvert également aux indépendants et aux agriculteurs. Les jeunes papas auront désormais 28 jours dont 7 obligatoires, pour les naissances à compter de juillet 2021. Concernant les autres congés, notamment le congé parental, le gouvernement a réaffirmé son souhait de les réformer. Ainsi, Adrien Taquet lancera « dans les prochains jours une mission visant à réfléchir à la refonte de l’ensemble des congés parentaux, en coopération avec la ministre du travail Élisabeth Borne et les partenaires sociaux. » Pas de précipitation donc car comme le souligne Adrien Taquet : « ce sujet est intimement lié à (...) celui des modes d’accueil (...). C’est une chose que de dire « il faut raccourcir et mieux rémunérer le congé parental », c’en est une autre de bien appréhender et anticiper les effets que cela peut avoir sur des pans entiers de notre organisation sociale, et c’est cette voie raisonnable que je choisis de suivre. »
  • Le parcours des 1000 jours : généralisation de l’entretien prénatal précoce du 4e mois de grossesse, création de 200 postes (sages-femmes, psychologues, médecins, travailleurs sociaux) dans une centaine de maternités prioritaires, renforcement de la PMI (cf début d’article), multiplication des visites à domicile post-accouchement pour lutter contre la dépression post-partum, instauration de groupes de parole avec la Cnaf (cf début d’article) 
  • Un parcours des 1000 jours spécifique pour les plus fragiles avec : 5 millions d’euros pour créer, dès 2021, 10 unités mère-enfant, 5 millions d’euros pour mettre en place 20 équipes mobiles en psychiatrie périnatale, l’expérimentation du « référent parcours 1000 jours », la création d’une Prestation de Compensation du Handicap et, dans chaque région, d’un Service d’accompagnement à la parentalité des personnes en situation de handicap (SAPPH).
  • Des messages de santé publique clairs et uniformisés, relayés dans les carnets de santé et « irrigueront la formation des différents professionnels, afin qu’ils puissent les transmettre aux parents tout au long de leur parcours 1 000 jours. » Ces messages « seront au cœur d’une « Application 1 000 jours » d’information et de services, qui sera développée d’ici l’été 2021 pour accompagner les parents dans leur quotidien. »
Article rédigé par : Caroline Feufeu
Publié le 29 septembre 2020
Mis à jour le 13 octobre 2020