Rapport de l’OCDE : les crèches doivent se doter de programmes pédagogiques

Longtemps la fierté de la France a été d’avoir une des meilleures écoles maternelles, longtemps ce fut une école sans programme. Ce n’est plus le cas depuis 1989 et à en croire le tout nouveau rapport des experts de l’OCDE, les crèches aussi devraient se doter de programmes éducatifs avec des objectifs très précis. Et des méthodes claires qui puissent être évaluées. Parce que plus on agit tôt, plus on se donne les chances de réduire les inégalités entre enfants issus de familles dévalorisées et les autres. Plus on a de l’influence sur leur future réussite scolaire
« Tout un ensemble de recherches menées ces dernières années, notamment dans le domaine des neurosciences, montrent que l’éducation et l’accueil des jeunes enfants (EAJE) assure aux apprentissages venant par la suite une assise indispensable en ce qu’elle favorise le développement de compétences, cognitives ou non, qui se révèlent déterminantes pour réussir dans la vie. Ces travaux laissent percevoir également que l’action positive de l’EAJE (sur les apprentissages et le développement ultérieurs de l’enfant) dépend dans une large mesure de la qualité des services. C’est la raison pour laquelle les pouvoirs publics eux aussi s’intéressent de plus en plus aux comparaisons internationales dont l’EAJE, avec son potentiel et ses retombées, peut faire l’objet comme ils s’emploient à définir des politiques de mobilisation des ressources face à une demande orientée à la hausse ». Dès le préambule les auteurs du rapport : « Petite Enfance, grands défis 2017 : indicateurs clés de l’OCDE sur l’éducation et l’accueil des jeunes enfants » que vient de publier l’OCDE affichent clairement leurs démarche et parti-pris. Ce rapport qui compare les systèmes petite enfance (équivalents de nos crèches et écoles maternelles) de 37 pays de l’OCDE a été établi en collaboration avec des chercheurs et experts scientifiques notamment. Un rapport qui va dans le sens du dernier rapport publié par Terra Nova.

Les systèmes intégrés plus efficaces ?
Pourquoi la France, parmi les pays étudiés est-elle si bien placée en termes quantitatifs (nombre de places offertes dans les crèches et taux de scolarisation en maternelle) et si mal en termes de résultats ? Pour Éric Charbonnier, expert éducation à l’OCDE en charge de la petite enfance, au regard de ce qui se passe dans d’autres, plusieurs raisons peuvent expliquer cette contre-performance qui se retrouve dans les résultats de l’étude PISA, étude qui établit un classement des performances scolaires dans plusieurs matières des éléves dans différents pays. La principale résidant sans doute dans cette fragmentation du système à la française. Les crèches et les écoles maternelles dépendant de deux ministères différents, elle ne poursuivent pas le mêmes objectifs et n’appliquent pas les mêmes méthodes pédagogiques. Leurs professionnels n’ont pas le même niveau de formation.  
Les pays qui s’en sortent le mieux sont ceux qui ont des systèmes intégrés : une seule autorité de tutelle pour les services d’accueil des jeunes enfants de 0 à 6 ans. Avec une continuité de programmes bénéfiques aux progrès des enfants et des transitions entre « services de garde » (crèches) et éducation pré primaire (école maternelle) facilitée. Particulièrement à ceux issus de familles défavorisées on le sait plus les petits fréquentent des lieux d’accueil dès leur plus jeune âge (un an) mieux ils s’en sortent. De nombreuses études le prouvent et des évaluations de certains programmes anglo saxons notamment mettent en avant des résultats largement positifs.

Des programmes éducatifs dés un an
Autre lacune française selon Éric Charbonnier : le manque de programmes éducatifs dignes de ce nom en crèche. « Pas question de transformer les crèches en écoles maternelles se défend –t-il, mais en revanche il faut leur donner des objectifs plus pédagogiques. Il faut y développer le langage avec des pédagogies adaptées à l’âge des petits qui les fréquentent. On doit on peut (il y a des exemples à l’étranger) avoir des objectifs clairs. Mais il faut des méthodes basées sur le jeu car sans méthodes, il y a des disparités trop importantes d’une crèche à l’autre ».
Développer la pédagogie en crèche, en faire des lieux d’apprentissages… C’est une voie qui semble assez éloignée de celle jusqu’alors valorisée en France. Les crèches étant des lieux où les professionnels accompagnent le développement -qui est global- du jeune enfant…mais des crèches où il existe des projets pédagogiques (certes qui ne sont pas nationaux mais quand même…) et où l’analyse de pratiques permet d’évaluer un certain nombre d’actions mises en place pour les enfants. Pour cet expert de l’OCDE enfin il faudrait revoir formation des professionnels « afin qu’ils soient mieux préparés ». Deux points à approfondir selon lui : les capacités socio-émotionnelles et le langage.

D'autres enquêtes en cours
Dans cet esprit de comparaison et d’évaluation des systèmes « préscolaires » des différents pays, l’OCDE va poursuivre ses travaux « petite enfance ». Plusieurs enquêtes sont en cours. L’enquête TALIS (enquête internationale sur l’enseignement et l’apprentissage) va porter sur les personnels d’éducation et d’accueil du jeune enfant, la qualité de l’environnement et du bien-être dans les différents établissements. Le rapport devrait être publié en 2019. A noter la France ne fait pas partie de cette étude. Une deuxième enquête travaillera autour de la notion de qualité de l’éducation et de l’accueil des jeunes enfants. Et notamment l’établissement de critères. Résultats en 2020. Enfin l’étude internationale sur l’apprentissage et le bien-être des jeunes enfants est une évaluation internationale qui cherche à mesurer les résultats cognitifs et non cognitifs des enfants (âgés de 5 ans). Le rapport final est prévu pour 2020.


Voir le rapport dans son intégralité  à télécharger ci-dessous :
    Pièce(s) jointe(s):
  • 769.92 Ko ocde.pdf
Article rédigé par : Catherine Lelièvre
Publié le 28 juin 2017
Mis à jour le 19 juillet 2017